Une ordonnance du 25 mars 2020 précise les possibilités d'adaptation du fonctionnement et de l'organisation des établissements et services sociaux et médico-sociaux (ESSMS) pour faire face aux impacts de l'épidémie de covid-19.
Permettre l'accompagnement en urgence des publics vulnérables dans le contexte de l'épidémie de covid-19, de manière temporaire en relais du domicile ou bien à domicile, diversifier les publics accompagnés par les structures pour fluidifier les capacités de réponse : tels sont les objectifs de l'ordonnance du 25 mars 2020 permettant d'adapter certaines règles de fonctionnement et d'organisation des établissements et services sociaux et médico-sociaux (ESSMS).
Sauf précision contraire, ses dispositions sont applicables à compter du 12 mars 2020 et jusqu'à la date de cessation de l'état d'urgence sanitaire. Les mesures prises dans ce cadre prendront fin au plus tard trois mois après cette date. Un projet de loi de ratification de l'ordonnance devra être déposé devant le Parlement d'ici le 26 mai 2020.
Fonctionnement adapté
Afin de faire face aux conséquences de l'épidémie de coronavirus, les ESSMS et les lieux de vie et d'accueil (LVA) peuvent « adapter leurs conditions d'organisation et de fonctionnement et dispenser des prestations non prévues dans leur acte d'autorisation ». Concrètement, ils peuvent dans ce cadre :
- déroger aux conditions minimales techniques d'organisation et de fonctionnement en principe applicables à leur structure ;
- recourir à un lieu d'exercice différent ou à une répartition différente des activités et des personnes prises en charge.
Ils ont également la possibilité de déroger aux qualifications de professionnels requis applicables, ainsi qu'aux taux d'encadrement prévus par la réglementation (lorsqu'ils y sont soumis).
Dans tous les cas, les structures doivent veiller « à maintenir des conditions de sécurité suffisantes dans le contexte de l'épidémie de covid-19 ».
Accueil d'usagers supplémentaires
Les ESSMS sont par ailleurs autorisés à accueillir ou accompagner plus de personnes que ce que prévoit leur autorisation, dans la limite de 120 % de leur capacité autorisée (par exemple, un établissement autorisé pour 100 personnes peut accueillir 20 usagers en plus au maximum). Il peut s'agir d'une prise en charge temporaire ou permanente. Ils doivent veiller à maintenir des conditions de sécurité suffisante dans le contexte de l'épidémie.
Dans le cadre de cette mesure, les services d'aide et d'accompagnement à domicile (Saad) intervenant auprès de bénéficiaires de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) ou de la prestation de compensation du handicap (PCH) peuvent même accompagner des personnes qui ne relèvent pas de la zone d'intervention pour laquelle ils sont autorisés.
Diversifier les publics accueillis
En outre, afin de fluidifier les capacités de réponses à apporter en ces temps de crise, l'ordonnance permet aux établissements pour personnes handicapées de prendre en charge des publics figurant en dehors de leur acte d'autorisation.
Adolescents handicapés
Les adolescents âgés de 16 ans et plus peuvent être accueillis (dans des conditions de sécurité suffisante) dans les établissements intervenant auprès d'adultes handicapés, relevant du 7 ° du I de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles (maisons d'accueil spécialisées, foyers d'accueil médicalisé, etc.).
Mineurs et jeunes majeurs relevant de l'ASE
Les établissements d'enseignement pour enfants handicapés (relevant du 2° du I de l'article L. 312-1 du CASF, comme les instituts médico-éducatifs) et les établissements pour adultes handicapés peuvent accueillir des mineurs et jeunes majeurs de moins de 21 ans pris en charge au titre de l'aide sociale à l'enfance (ASE). Ce, lorsque l'établissement qui les prend habituellement en charge n'est pas en mesure de les accueillir dans des conditions de sécurité suffisante dans le contexte de l'épidémie de coronavirus.
Recours à l'accompagnement à domicile
Les établissements pour enfants et adultes handicapés qui ne sont plus en mesure d'accueillir, dans des conditions de sécurité suffisante dans le contexte de l'épidémie, leurs résidents, peuvent adapter leurs prestations afin de les accompagner à domicile, en recourant :
- à leurs personnels ;
- ou à des professionnels libéraux ;
- ou à des services intervenant auprès d'enfants ou d'adultes handicapés ou de personnes âgées, ou encore à un centre d'action médico-sociale précoce (Camsp).
Les établissements les rémunèrent à cet effet.
Sont concernés par cette mesure : les établissements d'enseignement pour enfants handicapés, les établissements et services d'aide par le travail (Esat), les établissements de réadaptation, de préorientation et de rééducation professionnelle, ainsi que les établissements pour adultes handicapés.
Admission sans décision de la CDAPH
Les admissions dans les ESSMS et les LVA prises en application de ces dispositions dérogatoires peuvent être prononcées sans décision préalable d'orientation par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH).
Accueil temporaire : pas de durée limitée
En principe, l'admission en accueil temporaire dans une structure médico-sociale pour personnes handicapées est limitée, pour chaque personne handicapée, à 90 jours par an. L'ordonnance autorise à déroger à cette limitation.
Décision par le directeur
Les adaptations dérogatoires permises par l'ordonnance sont décidées par le directeur de l'établissement ou du service après consultation du président du conseil de la vie sociale (CVS) et du comité social et économique (CSE), lorsque la structure en est dotée.
Le directeur doit informer, « sans délai », de ses décisions d'adaptation dérogatoire la ou les autorités de contrôle et de tarification compétentes, ainsi que, le cas échéant, la CDAPH. Si la sécurité des personnes n'est plus garantie, ou si les adaptations proposées ne répondent pas aux besoins identifiés sur le territoire, l'autorité compétente peut, à tout moment, s'opposer à leur mise en œuvre ou les adapter.
Financement sécurisé
Que les gestionnaires d'ESSMS se rassurent : en cas de sous-activité ou de fermeture temporaire résultant de l'épidémie de covid-19, le niveau de financement de leur structure n'est pas modifié. L'ordonnance précise que pour la partie de financement des ESSMS qui ne relève pas de dotation ou de forfait global, « la facturation est établie à terme mensuel échu sur la base de l'activité prévisionnelle, sans tenir compte de la sous-activité ou des fermetures temporaires résultant de l'épidémie ».
Pas de modulation liée à l'activité en 2021
En 2021, il ne sera pas procédé à la modulation des financements en fonction de l'activité constatée en 2020. Cette modulation peut en particulier être prévue dans les contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens (Cpom) des Ehpad et du secteur handicap. Cette disposition entrera en vigueur au 1er janvier 2021.
Rallonge pour les formalités budgétaires
Autre mesure qui soulagera les gestionnaires : les délais prévus dans les procédures administratives, budgétaires ou comptables auxquelles sont soumis les ESSMS, expirant à compter du 12 mars 2020 et jusqu'à la date de cessation de l'état d'urgence sanitaire, sont prorogés d'un délai supplémentaire de quatre mois.
Par exemple, les comptes administratifs, rapports d'activité, états des prévisions des recettes et des dépenses (EPRD) et états réalisés des recettes et des dépenses (ERRD) doivent en principe être transmis au 30 avril. Les gestionnaires bénéficient donc d'un sursis de plusieurs mois pour transmettre les documents qui les concernent.
Rémunération des travailleurs en Esat
Enfin, l'ordonnance acte une mesure annoncée par le secrétariat d'État chargé des Personnes handicapées concernant les travailleurs accueillis en Esat. En cas de réduction ou de fermeture d'activité résultant de l'épidémie de covid-19, leur rémunération est maintenue. L'écart de financement entre le niveau résultant de cette réduction ou fermeture et le niveau antérieur de la rémunération garantie des travailleurs handicapés sera en effet compensé par les aides au poste versées par l'État.
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