Possibilité de recourir à du personnel non qualifié ou d'accueillir des publics non prévus pour les ESSMS, prorogation du versement de certaines prestations et des mesures d'aide... Zoom sur les mesures législatives et réglementaires prises pour faire face au covid-19.
Le secteur social et médico-social est fortement impacté par les mesures prises pour lutter contre l’épidémie de covid-19 : fermeture de certains types d’établissements et services sociaux et médico-sociaux (ESSMS), comme les externats pour personnes handicapées, absentéisme des personnels devant rester chez eux pour garder leurs enfants ou étant malades ou susceptibles d’être infectés par le virus, etc.
Pour permettre aux gestionnaires de faire face à ces conditions de fonctionnement inhabituelles, le gouvernement a autorisé, par ordonnance du 25 mars 2020, les ESSMS à adapter leurs modalités d’exercice et d’organisation.
Par ailleurs, afin que les publics vulnérables puissent continuer à percevoir leurs allocations, sans que le confinement entraîne une situation de rupture des droits, une autre ordonnance du 25 mars 2020 a posé le principe d’une prolongation automatique de nombreux droits sociaux pour plusieurs mois (AAH, RSA...). De même, les mesures administratives et juridiques dont l’échéance arrive pendant la durée de l’état d’urgence sanitaire sont automatiquement reconduites pour une certaine durée, telles que les mesures de protection juridique (tutelle, curatelle) ou les mesures prises dans le domaine de l’assistance éducative.
Ces dispositions sont par nature temporaires. Leur durée de vie est limitée à la période d’état d’urgence sanitaire et aux quelques mois suivants.
En complément de ces mesures législatives et réglementaires, le ministère des Solidarités et de la Santé publie régulièrement des fiches de consignes et recommandations pour guider et soutenir les professionnels du secteur social et médico-social pendant cette période particulière.
[Mise à jour du 14/05/2020 : publiées après la mise en ligne de ce dossier juridique, deux ordonnances du 13 mai 2020 ont adopté de nouvelles mesures pour faire face à la crise sanitaire : reconduction des mesures d'accompagnement à la scolarité des enfants handicapés, aménagement du contentieux relatif au droit au logement opposable (Dalo), etc.]
1. Adaptation du droit des ESSMS
Pour faire face aux difficultés d'organisation des ESSMS liées aux conséquences de l'épidémie de coronavirus (pénurie de personnels par exemple) et pour offrir des solutions d'accompagnement aux personnes handicapées notamment sans solution de prise en charge, l'ordonnance n° 2020-313 du 25 mars 2020 permet aux structures d'adapter leur fonctionnement et d'accueillir des publics non prévus. Ces dispositions, complétées par une ordonnance du 15 avril, sont applicables depuis le 12 mars 2020 et jusqu'à la date de cessation de l'état d'urgence sanitaire. Les mesures prises dans ce cadre prendront fin au plus tard trois mois après cette date. Un projet de loi de ratification de l'ordonnance devra être déposé devant le Parlement d'ici le 26 mai 2020. La Direction générale de la cohésion sociale (DGCS) présente ces nouvelles dispositions dans une instruction du 17 avril 2020 [référence mise à jour le 29 avril].
Conditions de fonctionnement
Les ESSMS, ainsi que les lieux de vie et d’accueil (LVA), peuvent ainsi adapter certaines de leurs règles de fonctionnement et d’organisation et dispenser des prestations non prévues dans leur acte d’autorisation. Tout en veillant « à maintenir des conditions de sécurité suffisantes dans le contexte de l'épidémie de covid-19 », ils peuvent :
- déroger aux conditions minimales techniques d'organisation et de fonctionnement en principe applicables à leur structure ;
- recourir à un lieu d'exercice différent ou à une répartition différente des activités et des personnes prises en charge ;
- déroger aux qualifications de professionnels requis applicables ;
- déroger aux taux d'encadrement prévus par la réglementation, lorsqu'ils y sont soumis.
S’agissant de la dérogation à la qualification des professionnels, l’Uniopss recommande que ceux non-qualifiés « interviennent en renfort d’une équipe existante confrontée à du sous-effectif » et qu’ils ne se substituent pas à l’ensemble des professionnels qualifiés. Elle indique en outre que le secrétaire d’État chargé de la Protection de l’enfance, Adrien Taquet, a précisé aux associations du secteur que « les personnes dont l’appartenance au fichier judiciaire automatisé des auteurs d'infractions sexuelles ou violentes (FIJAISV) n’avait pas été vérifiée ne pouvaient pas intervenir auprès de mineurs ».
La Fnas-FO (Fédération nationale action sociale) se montre assez circonspecte vis-à-vis de cette disposition, expliquant qu'à « la contamination du fait du covid-19 s’ajoute la potentielle mise en danger dans les prises en charge par la présence de non professionnels, de professionnels insuffisamment qualifiés et qui plus est en nombre réduit ».
Réquisition des établissements médico-sociaux
Les établissements médico-sociaux peuvent être réquisitionnés pendant la durée de l’état d’urgence sanitaire par le représentant de l’État dans le département, afin de faire face à l'épidémie. Cette mesure, prévue par un décret du 26 mars 2020, est strictement encadrée. Elle doit notamment être justifiée par un afflux important de victimes ou par la situation sanitaire, nécessaire et proportionnée. L’avis du directeur général de l’agence régionale de santé (ARS) concerné doit être préalablement sollicité à la mesure générale ou individuelle prononçant la réquisition.