Dans une note, le comité stratégique de la CNSA demande aux pouvoirs publics de prendre en compte les nécessités de l'intervention domiciliaire. Les acteurs de terrain doivent avoir plus de latitude pour réagir et innover face à la menace du coronavirus.
On ne se refait pas ! En gaulliste née en Corrèze, Marie-Anne Montchamp (MAM) ne peut s'empêcher d'employer des images de guerre. L'ancienne ministre de Jacques Chirac parle ainsi des « réseaux de résistance » en désignant les combattants de terrain engagés contre le Covid-19. L'emploi du mot résistance - qui fera sourire certains - n'est pas fait au hasard : il s'agit de montrer que nous sommes engagés dans une partie essentielle, inscrite dans la durée, qui suppose de nous adapter et de sortir de notre petit train-train.
Deuxième cercle
Le comité stratégique de la CNSA est une émanation de son conseil que préside MAM : il s'est réuni à deux reprises en mars (en visioconférence) pour réfléchir aux incidences du « confinement domiciliaire dans le cadre de l’état d’urgence ». En fait, si les protocoles concernant l'hôpital sont nombreux, les éléments de cadrage de l'intervention du deuxième cercle, celui du domicile, sont très rares. Voilà pourquoi le comité stratégique propose un document de cadrage de cette intervention.
Coordination territorialisée
Le comité demande la mise en place d'une coordination territorialisée « confinement » qui aurait pour mission d'alerter en continu, le préfet, le président du conseil départemental et le directeur général de l’ARS et le rectorat. C'est une sorte de veille que demande la CNSA pour que les problèmes rencontrés localement par les acteurs soient très vite résolus. « Dans certains endroits, si une aide à domicile rencontre un problème, il faut que la réponse soit trouvée dans les deux heures. Ailleurs, la réaction peut intervenir dans la demi-journée », précise Marie-Anne Montchamp.
Personnels invisibles
Concernant la situation du domicile, le comité parle d' « urgence absolue ». Et le comité d'ajouter : « Les personnels de l’aide et de l’accompagnement, les aidants, se sentent encore invisibles : ils sont inquiets pour leur sécurité, celle de leurs proches, pour les personnes qu’ils accompagnent ». Le document énumère les grandes difficultés que nous avons déjà explicitées dans nos précédents articles (lire ici ou là) : absence totale ou en nombre suffisant de matériel de protection (masques), injonctions contradictoires, etc.
Des renforts en personnel
Par exemple, explicite la CNSA, « même si un ou plusieurs cas est/sont identifiés dans l’établissement, les professionnels doivent poursuivre l’exercice des activités essentielles d’aide, d’accompagnement, de soin souvent sans masques et sans savoir si les autres personnes accueillies sont contaminées ou non. » Sur le plan humain, le comité insiste sur la nécessité de prévoir des renforts si on souhaite que l'intervention domiciliaire continue dans la durée.
Anticiper à une, deux, trois semaines
Après les constats, les préconisations ! Évidemment, il faut au préalable assurer la sécurité des intervenants en équipant tout le monde en masques. L'objectif doit être de viser l'égalité entre les territoires, sachant que leur état de contamination par le virus est très disparate. Cela suppose de bien évaluer la situation actuelle et d'anticiper à une, deux ou trois semaines. Cela suppose également de bien évaluer la situation des personnes accompagnées. Dans ce contexte, l'ensemble des dotations doit être versé à l'identique de l'année précédente. Les structures sont particulièrement fragiles. « Les services d'aide à domicile qui ont un mois de trésorerie sont les rois du pétrole », souligne l'ancienne ministre.
Libérer les énergies maintenant
La période que nous vivons depuis deux semaines exige de la souplesse et de la capacité d'adaptation. Il faut, par exemple, estime le document, « reconnaître la possibilité de glissement des tâches dans le temps ». Les professionnels doivent être soutenus, en mettant à leur disposition sur une plateforme des tutoriels. Plus largement, Marie-Anne Montchamp insiste sur la nécessité de « libérer les énergies maintenant ». Cela signifie de faire confiance aux établissements qui vont aménager leur activité pour répondre aux besoins. Des financements exceptionnels doivent pouvoir être débloqués rapidement.
Vers une mue des tutelles ?
Il ne doit plus être question d'attendre l'autorisation de la tutelle avant d'agir. « Il n'est pas possible de freiner les initiatives », prévient la présidente du conseil de la CNSA. Elle appelle donc à une véritable mue des tutelles qui doivent devenir encourageantes et accompagnantes avant de contrôler le respect de la norme. Ce n'est pas le moindre des enjeux qui nous vivons dans cette bien curieuse époque de confinement.