Notre série "En quête de sens" s'intéresse à la trajectoire singulière de travailleurs sociaux désireux de partager leur vision ou pratique du métier. Au Québec, l'aide médicale à mourir est légale depuis 2015. Patrick Durivage, travailleur social à Montréal, accompagne chaque année plusieurs personnes qui demandent à en bénéficier.
Ce n'est pas fréquent, pour un jeune homme dans sa vingtaine, de faire du bénévolat en soins palliatifs et de se spécialiser en gérontologie. Patrick Durivage a su très tôt que la fin de vie l'intéressait. En 1999, après des études en psychologie puis en service social, il devient travailleur social dans un service de maintien à domicile de personnes âgées.
L'aide médicale à mourir
Aujourd'hui, il effectue toujours des accompagnements de fin de vie à domicile et coordonne l'expertise en soins palliatifs à domicile au centre local de service communautaire (CLSC) René-Cassin à Montréal. Avec des universitaires, il effectue aussi un travail de recherche au centre de recherche et d'expertise en gérontologie sociale.
L’aide médicale à mourir (AMM) a surgi dans son quotidien de travailleur social en 2015. Cette année-là, le Québec a légalisé ce soin consistant à administrer un traitement causant son décès à une personne en fin de vie qui en fait la demande et qui répond à des critères stricts. « Au départ, j’avais l'impression que l'AMM allait à l'encontre de l'idée des soins palliatifs que je défendais : accompagner une mort naturelle sans la hâter ni la retarder. J'étais plutôt d'avis de rendre les soins palliatifs plus accessibles », se souvient Patrick Durivage.
Une souffrance extrême
Les premières demandes de personnes qu'il accompagne lui font voir les choses différemment : « Je travaillais alors auprès d’immigrants juifs, pour qui la vie est sacrée. Des survivants de l'Holocauste investis de l'idée qu'il faut vivre pour transmettre. » Il comprend alors que le cœur de toute demande d’aide médicale à mourir est la souffrance. Une souffrance extrême. « J’ai dû faire le constat que même les meilleurs soins palliatifs ne pouvaient pas soulager tout le monde. »
2 426 personnes ont reçu l’AMM en 2021 au Québec (soit 3,3 % des décès). 93 % présentaient des souffrances à la fois physiques et psychiques irrémédiables. 91 % avaient plus de 60 ans. 73 % étaient atteintes de cancer et 71 % avaient une espérance de vie de trois mois ou moins (1).