Éducateur auprès d’adolescents en "situation complexe" avec, pour la plupart, des problématiques d'addictions multiples, Fabien Primault se sert de sa propre expérience d’ancien consommateur pour aborder un sujet souvent tabou chez les travailleurs sociaux.
À 32 ans, éducateur spécialisé depuis seulement un an, le Nantais Fabien Primault a la sensation d’avoir déjà vécu mille vies. Maintenant qu’il accompagne celle des autres, il lui est plus aisé d’avoir du recul sur son parcours professionnel.
Celui-ci débute en fac de sport, où il passera six années, « à la base pour travailler dans le sport adapté ». Ses parents, eux, travaillent « dans la rééducation ». Son idée est fixe : s’impliquer auprès de publics en situation de handicap.
Du plaisir à la défonce
Lorsque le jeune homme débarque à l’université, il a déjà commencé à fumer du cannabis, beaucoup, depuis la classe de 1ère. « Au début c’était de la consommation-plaisir, mais c’est vite devenu pour la défonce. Sauf qu’à 17 ans, tu n’as pas d’argent. Je volais de l’argent à mes proches, je m’endettais auprès de dealers. » Comme le font nombre des adolescents qu’il suit aujourd’hui comme éducateur, dans un petit collectif composé de 4 mineurs.
Leurs réactions épidermiques, leurs manques, leurs impatiences, Fabien Primault les perçoit au premier coup d’œil. Et pour cause. « Moi au bout d’un moment, je suis devenu tendu, irritable. J’avais des tremblements dus au manque. J’ai essayé d’arrêter. » Cette première tentative est un échec. Il arrive pourtant à suivre ses cours, travaille un peu le week-end pour payer sa consommation. Celle-ci est quotidienne. Pendant un temps, il s’agit de 10 à 15 douilles [1] par jour. Il vend aussi un peu, juste à des amis, pour sa « conso perso ». La motivation s’évanouit, doublée d’une blessure à l’épaule. « Je n’avais plus envie de rien. J’étais au bord de la dépression. »