Malgré un enjeu démographique majeur, les métiers du grand âge souffrent d'un immense déficit d'attractivité. En cause, des problèmes d'image, de qualification, de salaire et de pénibilité sur lesquels chacun s'accorde. Face à des décisions politiques qui se font attendre, des initiatives naissent sur le terrain.
Des effectifs en baisse (-1,3 % en 2017-2018 dans l'aide à domicile, -0,6 % dans les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes – Ehpad) en regard de besoins en hausse constante ; une souffrance au travail majeure dont a témoigné en 2018 le mouvement des Ehpad ; une qualité de service qui ne peut plus être au rendez-vous : les constats sont unanimes sur la crise qui sévit dans le secteur du grand âge.
Et c'est le serpent qui se mord la queue, car le déficit d'attractivité de ces métiers difficiles, peu valorisés financièrement et socialement, génère des tensions telles dans les établissements et services, qu'elles n'en finissent pas de rebuter de potentiels candidats.
Le rapport Libault sur le grand âge et l'autonomie en mars, celui de Myriam El Khomri sur l'attractivité des métiers du grand âge fin octobre, et enfin celui de la députée Agnès Dufeu-Schubert sur l'image des aînés dans notre société, qui doit être remis le 12 décembre prochain, témoignent de la prise de conscience par les pouvoirs publics de l'urgence à agir.
Les solutions à envisager, ambitieuses, semblent elles aussi globalement partagées. Pour autant, les décisions et les moyens se font attendre, et chacun se demande s'ils seront vraiment à la hauteur du défi démographique à venir.
Cris d'alarme
Sur le terrain, face à l'urgence quotidienne, de nombreuses initiatives voient le jour, parfois depuis longtemps. Certaines s'apparentent à des gestes désespérés.
Ainsi de ce directeur de maison de retraite situé dans la banlieue d'Annecy qui a décidé de geler toute nouvelle entrée et a lancé des appels à l'aide cet été sur les médias et les réseaux sociaux, tant son déficit en personnel était dramatique.
Il a réussi par ce biais à recevoir des candidatures et à passer l'été sans trop de casse, mais le manque d'attractivité des métiers du grand âge dans cette région proche de la Suisse reste structurel, et ce sont des mesures de fond qui s'imposent.
La question salariale y est, entre autres, cruciale. Celle du recrutement de personnel qualifié également, et elle est commune à tout le secteur.
La solution de l'apprentissage
Aussi voit-on fleurir des initiatives en matière de formation. En septembre, le groupe Korian et la Croix-Rouge française ont annoncé l'ouverture d'une première classe commune d'aides-soignants en alternance en Ile-de-France.
Les apprentis, recrutés par Pôle emploi et les missions locales après leur réussite au concours d'aide-soignant, suivent des cours à l'institut Croix Rouge de Romainville (93) et sont intégrés pour la partie pratique dans des maisons de retraite du groupe Korian, situées au plus près de leur domicile.
Ils y sont accueillis par des infirmières coordinatrices formées au tutorat. Un recours à l'apprentissage pour encourager les futurs aides-soignants à exercer en maison de retraite, et une façon pour le groupe de bénéficier de stagiaires puis d'aides-soignants bien familiarisés à la pratique gérontologique.
Une aide pécuniaire
Ce fléchage des futurs professionnels a aussi pu se faire, en Occitanie par exemple, par le biais d'une aide pécuniaire fournie aux étudiants pendant leurs études en l'échange d'un engagement à travailler en Ehpad pendant plusieurs années.
L'expérimentation a débuté à la rentrée de septembre. L'optique est là encore de mieux lutter contre la concurrence des autres secteurs ayant recours aux aides-soignants, en encourageant la venue des élèves dans les structures du grand âge, qui souffrent d'un déficit d'image.
Élargir le vivier
Pouvoir répondre aux besoins massifs de recrutement suppose aussi d'aller chercher des candidats qui n'iraient pas d'eux-mêmes vers la formation d'aide-soignant, pour diverses raisons.
Sur l'impulsion du conseil départemental de la Creuse, une formation en alternance au métier d'aide à domicile pour des personnes très éloignées de l'emploi a vu le jour au début de l'année 2019.