Accompagner 10 000 travailleurs handicapés vers l'emploi en milieu ordinaire de travail en un an. Pour atteindre cet objectif gouvernemental, les structures déployant le dispositif d'emploi accompagné doivent passer à l'organisation en "mode plateforme".
L'emploi accompagné vise l'insertion des personnes handicapées dans le milieu ordinaire de travail. Il se base sur un accompagnement médico-social et un soutien professionnel du travailleur et de son employeur.
Expérimenté pendant une trentaine d’années, ce dispositif a été consacré par la loi Travail du 8 août 2016 et ses décrets d'application des 27 décembre 2016 et 3 avril 2017. Cinq ans plus tard, les résultats obtenus auprès des personnes accompagnées « sont satisfaisants » et démontrent « toute l’utilité » du dispositif, souligne une circulaire du 31 décembre 2021. Une « plus value » confirmée par l’Agence nationale des solidarités actives (Ansa).
Des adaptations sont toutefois apparues nécessaires, afin de « fluidifier les parcours », limiter les « risques de rupture de trajectoire » et « accompagner un plus grand nombre » de personnes. Pour atteindre ces objectifs, le gouvernement a choisi de faire évoluer les structures d’emploi accompagné pour qu’elles fonctionnent sous la forme de plateformes départementales. L’idée ? Mutualiser les moyens et savoir-faire des acteurs du médico-social (établissements et services sociaux et médico-sociaux) et de l’emploi (Pôle emploi, Cap emploi, missions locales), sur un même territoire.
Pour 2022, l’objectif est de proposer une offre de service « emploi accompagné » par département et d’accompagner 10 000 personnes dans ce cadre.
1. Caractéristiques des personnes accompagnées
Établissement et service d'aide par le travail (Esat), entreprise adaptée, établissement ou service de réadaptation, de préorientation et de rééducation professionnelle (ESRP/ESPO), aides de l'Agefiph... Difficile de s'y retrouver dans les nombreux dispositifs d'aide à l'emploi destinés aux personnes handicapées.
Comment savoir si le dispositif d'emploi accompagné est la solution la plus adéquate pour une personne ? Si la décision ne peut être prise qu'après évaluation de la situation de l'intéressé, par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH) ou du service public de l'emploi (SPE), les données issues de l'évaluation du dispositif par l'Ansa permettent de faire émerger le « profil type » des personnes accompagnées : personnes dans une situation de handicap non visible (troubles du psychisme, du spectre autistique...), plutôt jeunes (la moitié ayant moins de 30 ans), dotées d'un faible niveau de formation et éloignées de l'emploi.
Un dispositif adapté au handicap intellectuel
Des expérimentations menées localement avant la consécration légale de l’emploi accompagné ont montré que ce dispositif « correspond particulièrement aux situations requérant une intervention humaine et répond aux besoins des personnes présentant des difficultés de communication et d’interaction sociale », relève le guide pratique de l'emploi accompagné du 17 avril 2018. Il semble « plus particulièrement adapté » pour les personnes présentant des troubles psychiques, cognitifs, du spectre de l’autisme ou une déficience intellectuelle.
Le rapport d'évaluation de l'Ansa de septembre 2021 confirme ce point. 88 % des personnes accompagnées présentent un tel handicap non visible, relève-t-elle.
Un faible niveau de formation
Autre constatation : la plupart (57 %) des bénéficiaires du dispositif sont dotés d'un « faible niveau de formation ». 35 % d'entre eux disposent d'une formation de niveau CAP, BEP ou brevet, et 22 % d'aucun diplôme.
Des bénéficiaires éloignés de l'emploi
Même si le dispositif d'emploi accompagné peut bénéficier aux personnes handicapées en situation d'emploi, l'Ansa relève qu'à l'entrée dans le dispositif, 71 % des personnes étaient sans emploi ou demandeurs d'emploi. Parmi celles-ci, 19 % n'ont jamais travaillé et 32 % ont été sans emploi pendant plus de deux ans.
« L'emploi accompagné concerne avant tout des personnes très éloignées de l’emploi », constate-t-elle.
Pour quels résultats ?
Pour l'Agence, le dispositif « fait ses preuves », dans la mesure où 58 % des personnes sans emploi à l’entrée ont travaillé dans le cadre de l'emploi accompagné. Les personnes très éloignées de l'emploi semblent particulièrement profiter des effets du dispositif, le rapport relevant « un taux de retour à l’emploi de 49 % pour les personnes n’ayant pas travaillé depuis plus de deux ans ».
S'agissant du volet « maintien dans l'emploi », les résultats semblent plus nuancés. Le taux de maintien dans l’emploi « est de 58 % à l’issue des 6 premiers mois, de 46 % à l’issue des 12 premiers mois et de 37 % à l’issue des 18 premiers mois », note l'Ansa.
Plus-values et bénéfices économiques
Outre l'accès ou le maintien dans l'emploi, le dispositif apporte des plus-values aux bénéficiaires, selon les témoignages recueillis par l'Ansa : gain en confiance en soi des personnes accompagnées, proximité plus forte avec le référent, appui dans l'accès aux droits, etc.
Dans un autre rapport, de mai 2022, l'Agence analyse par ailleurs les « coûts évités » grâce au dispositif d'emploi accompagné, en matière d'arrêts de travail, de recours à certaines allocations (allocation aux adultes handicapés, revenu de solidarité active et allocation de retour à l'emploi) et d'hospitalisations psychiatriques. Sur la première année d'accompagnement, elle estimait à 5 millions d'euros les coûts évités.