Psychologue du travail, Anne Lefaivre-Liagre intervient dans le secteur sanitaire, social et médico-social pour du diagnostic, du conseil et de l’accompagnement d’équipes et de managers, ainsi que pour de la médiation. Souvent sollicitée dans des situations de tensions ou de conflit, elle livre ici ses impressions sur les moyens, dans des contextes contraints, de travailler à éviter la maltraitance et à remettre du sens.

Vous êtes régulièrement sollicitée dans des hôpitaux, en crèche ou encore en établissements pour personnes âgées dépendantes (Ehpad). Qu’est-ce qui vous frappe le plus aujourd’hui dans ces secteurs ?

Anne Lefaivre-LiagreSans doute de percevoir tant d’usure professionnelle, parfois même chez des très jeunes, notamment dans le milieu de la santé, où il y a beaucoup de départs précoces. Cela concerne les infirmières, les cadres de santé, et aussi les médecins dont on parle moins. J’ai organisé des formations pour de futurs cadres de santé ; certains évoquaient un mal-être, alors même qu’ils n’avaient pas démarré leur fonction d’encadrement. Ça interpelle.

Il faut dire que ces professionnels sont exposés à de nouvelles logiques de marché, avec des contraintes très vives – contraintes financières, contraintes dans la posture physique, forte charge émotionnelle, perspectives d’évolution plus ou moins bien accompagnées.

En crèche, c’est un peu différent, la charge de travail est davantage liée à des exigences de taux d’occupation, à des logiques de places, au fait de devoir travailler avec un nombre d’enfants plus important, ou des familles parfois en grande difficulté… Cela peut générer des tensions.

Cela étant, je constate aussi que beaucoup d’établissements restent soucieux de la santé au travail et engagent des démarches de prévention pour limiter ces risques.

Face à des contraintes parfois lourdes, quelles marges de manœuvre reste-t-il lorsque vous êtes sollicitée pour du diagnostic organisationnel ?

A. L-L.Les contraintes sont variables selon les structures, et il reste heureusement toujours des marges de manœuvre ! Il s’agit d’instaurer des espaces de régulation et de dialogue sur les pratiques professionnelles, afin de réfléchir aux ressources qu’il est possible de développer pour mieux faire face à ces contraintes.