L'aide médicale de l'État permet aux étrangers en situation irrégulière d'avoir accès, sous conditions, au système de santé français. Le dispositif a été récemment réformé et ses modalités d'accès durcies, notamment pour lutter contre les fraudes.
L'aide médicale de l'État (AME) a été créée par la loi du 27 juillet 1999 relative à la couverture maladie universelle (CMU). En vigueur depuis le 1er janvier 2000, elle permet aux personnes de nationalité étrangère, qui vivent en situation irrégulière en France, de voir certains de leurs soins de santé pris en charge.
Avant cette date, ces personnes pouvaient bénéficier soit, jusqu'en 1993, de l'assurance maladie de droit commun – aucune condition de régularité de séjour n'était alors imposée – soit de l'aide médicale départementale (AMD) dont le financement incombait, comme son nom l'indique, aux départements.
Depuis sa création, l'AME fait l'objet de critiques récurrentes, en particulier de la part de la droite et de l'extrême droite. Celles-ci tiennent notamment à son coût pour les finances publiques (990 millions d'euros dans la loi de finances pour 2021) et aux fraudes dont le dispositif serait victime.
C'est notamment pour lutter contre ces détournements que le gouvernement d'Édouard Philippe a engagé, à l'automne 2019, une réforme de l'AME allant dans le sens d'un durcissement.
Cette décision, dénoncée par le secteur associatif, s'appuyait notamment sur un rapport des inspections générales des finances (IGF) et des affaires sociales (Igas) pointant, notamment, des « atypies » renforçant « de façon convaincante l’hypothèse d’une migration pour soins, qui n’est clairement pas un phénomène marginal ».
Le régime de l'aide médicale de l'État a donc été remanié par la loi de finances pour 2020, qu'un décret du 30 octobre 2020 est venu compléter. En raison de la crise sanitaire, l'entrée en vigueur de ces nouvelles dispositions, initialement prévue au 1er janvier 2021, a été reportée au 1er juin 2021.
Ce dossier juridique propose une présentation de cette nouvelle version de l'AME. Les autres dispositifs d'accès aux soins des personnes en situation de précarité sont détaillés dans un dossier juridique dédié.
1. L'éligibilité à l'AME
A. Les conditions
Le code de l'action sociale et des familles (CASF) prévoit qu'un étranger peut bénéficier de l'AME lorsque :
- il réside en France de façon irrégulière de manière ininterrompue depuis au moins trois mois à compter de l'expiration de son visa ou de son titre de séjour ;
- ses ressources « de toute nature » ne dépassent pas 9 041 € par an, pour une personne seule.
Un décret du 11 juin 2020 a permis aux organismes de sécurité sociale d'accéder à la base de données relative aux étrangers sollicitant la délivrance d'un visa en France – dite Visabio – afin de vérifier que les personnes qui demandent à bénéficier de l'AME sont bien en situation irrégulière. Une circulaire du Directeur général de la Caisse nationale d'assurance maladie (Cnam) a détaillé ces modalités de consultations.
Le droit à l'AME est aussi ouvert aux personnes ne résidant pas habituellement en France mais qui sont admises individuellement par décision ministérielle à titre humanitaire lorsque leur état de santé le justifie.
Les personnes gardées à vue sur le territoire français peuvent, elles aussi, bénéficier de l'AME, qu'elles résident ou non en France, si leur état de santé le justifie.