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Tribune libre07 juillet 2022
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L’âgisme présent au cœur de nos politiques sociales

Directrice de la structure d'aide à domicile LogiVitae, Dafna Mouchenik dénonce dans cette tribune libre* les différences de prise en charge liées à l'âge : la prestation de compensation du handicap (PCH) pour les moins de 60 ans, et l'allocation personnalisée d'autonomie (APA), jugée insuffisante pour les personnes âgées souhaitant vieillir à domicile.

La France, pays solidaire et humaniste, a pensé et organisé le soutien à domicile de sa population. Aussi, si la maladie nous frappe, si le handicap nous habite, si un accident de la vie nous amoindrit au point de ne plus pouvoir réaliser seul les gestes essentiels de la vie quotidienne, la prestation de compensation du handicap (PCH) nous sera allouée.

La PCH permet une vie à domicile dans de bonnes conditions

La PCH permet de financer les dépenses liées à la perte d'autonomie. Même si aucun dispositif n’est parfait, bien pensé et suffisamment calibré, cette prestation comprend aide humaine, aide technique, aide à l’aménagement du logement, aide au transport, aide spécifique ou exceptionnelle, aide animalière. De sorte que la vie à domicile reste possible et dans de bonnes conditions, y compris lorsque l’on souffre d’un handicap très invalidant.

Ainsi, un maximum de 6 heures d’intervention d’aide humaine par jour sont financées via la solidarité nationale de notre pays, avec la possibilité de dépasser ce plafond pour les personnes ayant besoin de la présence constante ou quasi constante d’un tiers (cela pouvant aller jusqu’à 24 heures d’intervention par jour). La juste réponse à chaque situation si… nous n’avons pas encore 60 ans.

L'APA, une allocation injuste et sous-dotée

Passé cet âge, nous ne sommes pas en situation de handicap, pas malade, pas victime d’un accident de la vie, nous sommes vieux. Et pour les vieux ce n’est pas la même musique. Pour eux, pas de PCH non : ils se verront attribuer l’allocation personnalisée d’autonomie (APA), une allocation injuste et sous-dotée au regard de leur réalité.

Pour eux et même dans le pire des états, s’ils font le choix de rester chez eux, la collectivité financera au mieux deux heures par jour (6 fois moins que s’ils entraient en Ehpad). À handicap égal, ils seront aidés et soutenus 3 à 10 fois moins que s’ils avaient eu moins de 60 ans.

Le maintien à domicile n'est possible que grâce à l'aide des proches

Si 90 % des personnes de plus de 75 ans peuvent rester chez elles jusqu’à la fin de leur vie, c’est essentiellement grâce à leur famille proche et non à la solidarité de notre pays. Conjoint(e)s, enfants portent à eux seuls deux tiers de l’aide nécessaire au soutien à domicile des vieux Français. On comprend dit comme ça l’épuisement qui est le leur et le sujet national qu’ils représentent à eux seuls.

Seulement 30 % de l’aide indispensable aux personnes âgées en difficulté est assurée par les professionnels du secteur, faute de moyens nécessaires et de politiques adaptées à son déploiement.

Pour nos vieux (pas si vieux, 60 ans), le libre choix du domicile – maintes fois annoncé par les différents gouvernements se succédant depuis plus de 15 ans – n’a jamais été mis en place ! Pire ils en sont exclus, un dispositif sous-calibré et inadapté ayant été pensé pour eux.

L’APA à domicile est une injustice faite aux plus de 60 ans. Pourtant personne ne s’insurge et elle a pu être pensée ainsi sans aucune résistance.

Cesser la discrimination par l'âge

Les conditions posées à nos solidarités ne devraient jamais reposer sur l’âge mais sur des données objectives de perte de capacité, d’invalidité, de degré de handicap et sur le soutien nécessaire pour continuer la vie que l’on souhaite mener, exactement comme cela a été pensé pour les moins de 60 ans.

Jeune ou vieux, aucune discrimination ne devrait être faite dans le cadre de nos politiques sociales. L’APA fait de nos soixantenaires et plus des adultes de second rang exclus d’un dispositif au motif de leur âge. La vieillesse n’est pas une maladie, vieillir ne conduit pas inexorablement à la perte d’autonomie ou au handicap. On peut être vieux et rester en forme, mais si la maladie frappe, que le handicap survient, le dispositif prévu pour la population adulte de notre pays ne peut en exclure une partie au motif de l’âge.

Alors que la quasi-totalité des Français souhaitent vieillir chez eux, les plus de 60 ans sont exclus des politiques sociales pouvant véritablement le leur permettre. Les dernières élections législatives de 2022 ne peuvent être prétexte à faire perdurer cette injustice. Une réponse transpartisane doit impérativement être portée par tous pour faire enfin du domicile un choix possible à tous les âges de la vie.

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* Les tribunes libres sont rédigées sous la responsabilité de leurs auteurs et n'engagent pas la rédaction du Media Social.

DafnaMOUCHENIK
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