Un an après le lancement du plan de lutte contre la pauvreté, Christelle Dubos et Olivier Noblecourt dressent un « point d’étape » positif sur sa mise en œuvre. L’occasion de répondre aux récents reproches du collectif Alerte.
« Nous travaillons en très bonne intelligence avec Alerte. Mais j’aimerais qu’on soit plus rigoureux. » L’invitation est lancée « en toute amitié » par Olivier Noblecourt, le 12 septembre, au ministère des Solidarités. Mais le délégué interministériel à la prévention et à la lutte contre la pauvreté n’a manifestement pas savouré les reproches adressés par ce collectif d’associations, le 9 septembre, en guise de premier anniversaire de la Stratégie. Après les « reculs » évoqués par Alerte, dès lors, le moment était venu pour le gouvernement d’insister, face à la presse, sur les « avancées » et les « perspectives », dans le déploiement de ce plan en 21 mesures contre la pauvreté.
Petits déjeuners
Pour dresser ce « point d’étape », la secrétaire d’Etat Christelle Dubos a d’abord égrené de premiers résultats tangibles de cette Stratégie engagée sur trois ans. Pour les jeunes, par exemple, des petits déjeuners gratuits étaient servis à 37 000 enfants, dès ce printemps, dans 400 écoles. Pour leurs parents, l’extension des Points conseil budget s’engage aussi, avec déjà 150 sites labellisés, en attendant les 400 envisagés. Quant à la formation des jeunes, elle progresse également, avec depuis le début d’année 57 000 admis à la garantie jeunes – soit 5 000 de plus que l’an dernier. L’accompagnement vers l’emploi, enfin, peut notamment bénéficier du « pacte d’ambition » pour l’insertion par l’activité économique, présenté le 11 septembre.
« Grandes réformes »
Mais la Stratégie de lutte contre la pauvreté se matérialise aussi à travers de « grandes réformes impulsées », ajoute Olivier Noblecourt. Ainsi pour ouvrir les crèches aux enfants pauvres, un « bonus mixité sociale » peut désormais être versé – à ce stade à un établissement sur quatre. Quant à l’obligation de formation jusqu’à 18 ans, elle est maintenant engagée pour la rentrée 2020. Le délégué interministériel évoque encore le plan de formation de 250 000 travailleurs sociaux, de « l’aller vers » à l’intervention collective, qui débutera l’an prochain. La Stratégie recouvre « des réponses immédiates, ainsi qu’une transformation de notre modèle social », commente le délégué.
Revenu universel d'activité
Quant à la concertation sur le revenu universel d’activité, d’abord lancée entre experts en juin, elle sera ouverte au public dès le 3 octobre, notamment par le lancement d’un site internet dédié. Cependant Christelle Dubos peut déjà préciser que les aides au logement seront bel et bien intégrées dans cette allocation unique, afin de simplifier les démarches et de lutter contre le non-recours. « Mais nous garantissons qu’un supplément logement sera identifié et que le tiers payant sera mis en place. » Après cette concertation, le revenu universel d’activité, tout comme le service public de l’insertion, sera défini par un projet de loi, soumis au Parlement dès 2020.
Changements de méthode
La Stratégie contre la pauvreté passe ainsi par plusieurs changements de méthode, remarque Olivier Noblecourt. Certains de ses engagements, comme la fin des sorties sèches de l’aide sociale à l’enfance, se réalisent à travers des contractualisations avec les départements. Et celles-ci sont désormais conclues partout – sauf avec les Hauts-de-Seine et les Yvelines selon nos informations. Quant à la participation des personnes concernées, elle doit encore prendre corps fin octobre, comme le révèle Christelle Dubos : la composition du Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale (CNLE) sera alors révisée, pour intégrer 50 % de bénéficiaires des minima sociaux. « Je suis heurté quand j’entends que le choc de participation n’aurait pas eu lieu », commente Olivier Noblecourt.
Mises au point
Le délégué interministériel en profite donc pour quelques mises au point. « Je ne peux pas laisser dire que les 10 % les plus pauvres auraient vu leur pouvoir d’achat diminuer. Je vous mets au défi de trouver un chiffre scientifiquement établi. » Pour sa part, Olivier Noblecourt cite une étude de l’Observatoire français des conjonctures économiques, prévoyant qu’en 2019 « les 5% de ménages les plus modestes verraient leur revenu disponible s’accroître en moyenne de 60 euros par an ». « Faisons collectivement preuve d’humilité », conclut le délégué interministériel. « Les graines sont semées, une dynamique est à l’œuvre. » Olivier Noblecourt devait, dans la foulée, ouvrir la première « Conférence nationale des acteurs » organisée en Seine-Saint-Denis pour ce premier anniversaire de la Stratégie.