Régularisation des sans-papiers dans les métiers en tension, intégration des étrangers, exclusion de certains jeunes majeurs de l'ASE… tour d'horizon des mesures de la loi "immigration" du 26 janvier 2024.
Après un parcours chaotique, la loi « pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration » du 26 janvier 2024 est désormais sur les rails. Elle vise à concilier « fermeté » et « intégration » en matière d'immigration en France. « Être gentil avec les gentils et méchant avec les méchants », avait résumé le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin.
Le texte définitif, qui avait été considérablement durci par rapport à la version présentée par le gouvernement en février 2023, a finalement été amputé de ses dispositions les plus critiquées par la gauche et les associations. Le Conseil constitutionnel a en effet censuré les mesures les plus controversées, comme celle qui conditionnait certaines prestations sociales à une durée de résidence en France ou celle qui touchait à l'inconditionnalité de l'hébergement d'urgence.
Les dispositions de la loi qui n'ont pas été censurées modifient tout de même considérablement la législation applicable aux étrangers.
Le principal objectif de la loi est d'accélérer les procédures d'expulsion pour les étrangers délinquants, même en situation régulière, en cas de menace à l'ordre public ou d'infraction grave. Parallèlement, le texte cherche à renforcer l'intégration des étrangers en France, par le travail, la langue et le respect des principes de la République.
Pour favoriser l'intégration, elle introduit un nouveau contrat « d'engagement au respect des principes de la République » que tous les étrangers souhaitant obtenir un titre de séjour doivent signer. Elle réforme également le droit d'asile pour accélérer l'examen des demandes et simplifie les règles du contentieux des étrangers, jugées trop complexes.
En matière d'emploi, la loi crée un nouveau titre de séjour pour les salariés des métiers en tension, et ce, jusqu'à fin 2026. Cette mesure était très attendue par nombre de professionnels du secteur social et médico-social pour remédier aux difficultés de recrutement. Toutefois, elle a été durcie lors de son examen au Sénat, passant d'une régularisation « automatique » à une régularisation « au cas par cas ».
Cinq circulaires ont déjà été publiées, et des décrets d'application sont évidemment attendus. En attendant, voici une première présentation des mesures de cette loi susceptibles d'intéresser les intervenants sociaux.
1. Prestations sociales, quotas migratoires, regroupement familial
Alors que le texte initial était composé de 27 articles et que la version adoptée par le Parlement en comptait 86, la loi publiée au Journal officiel comprend finalement 55 articles.
Le Conseil constitutionnel a en effet censuré 35 articles sur les 45 contestés par les députés et sénateurs de gauche, les considérant comme des « cavaliers législatifs », c'est-à-dire n'ayant pas de lien avec le projet de loi initialement déposé.
Certaines des mesures censurées par le juge constitutionnel auraient pu toucher les travailleurs sociaux au premier chef.
Prestations sociales
Le Conseil constitutionnel a censuré la mesure qui exigeait des étrangers non ressortissants de l'Union européenne une résidence en France d'au moins cinq ans ou une activité professionnelle de trente mois pour bénéficier de certaines prestations sociales : allocation personnalisée d’autonomie (APA), prestation d’accueil du jeune enfant (Paje), allocations familiales, complément familial, aides personnelles au logement (APL), allocation de soutien familial (ASF), allocation de rentrée scolaire (ARS), allocation journalière de présence parentale (AJPP).
Les mêmes critères étaient aussi posés pour pouvoir bénéficier du droit au logement opposable (Dalo).
Hébergement d'urgence
La loi aurait pu aussi bouleverser le principe de l'inconditionnalité de l’hébergement d’urgence. Le Conseil constitutionnel a censuré la disposition qui fermait l'hébergement d'urgence à « l’étranger ne bénéficiant pas d’un droit au séjour en France et faisant l’objet d’une décision portant obligation de quitter le territoire français [OQTF] ou d’une mesure d’expulsion ».
Dans le même ordre d’idée, dans les lieux d’hébergement pour demandeurs d’asile, le projet de loi prévoyait que, « sauf décision motivée de l’Office français de l’immigration et de l’intégration, les personnes ayant fait l’objet d’une décision de rejet définitive de leur demande d’asile ne [pouvaient] pas s’y maintenir ».
Cahier des charges national pour les MNA
Le projet de loi soumis au Conseil constitutionnel prévoyait par ailleurs la création d'un cahier des charges national, défini en concertation avec les départements, pour évaluer les jeunes se présentant comme mineurs non accompagnés (MNA). Considérée comme cavalier législatif, cette disposition a été censurée.
Quotas migratoires, regroupement familial, nationalité…
D'autres dispositions ont été remaniées, notamment celle qui prévoyait la tenue obligatoire d'un débat annuel au Parlement sur la politique d'immigration et la détermination de « quotas » ou d'objectifs de nombre de titres de séjour.