La procédure de préinscription en ligne a pu faire découvrir les IRTS à bien des bacheliers, cet été. Et de fait, les candidatures se sont multipliées - avec des profils renouvelés. Ces nouveaux engagements risquent-ils d'être plus volatils ?
Avis aux retardataires : « La procédure nationale de préinscription dans l'enseignement supérieur est désormais terminée. » Depuis ce 14 septembre à minuit, le message éconduit les visiteurs de la plateforme Parcoursup. Et les centres de formation en travail social peuvent y voir une bonne nouvelle : les listes de leurs élèves admis en première année vont, enfin, se stabiliser. Le répit sera sans doute bienvenu, au terme de ce premier été à recruter via le site lancé, en 2018, par le gouvernement.
Plâtres
Car ce n’est que pour cette rentrée 2019 que la préinscription sur Parcoursup a été demandée, également, aux bacheliers intéressés par les formations en travail social. Et cette extension de la procédure a été décidée « de manière un peu précipitée, avec des échéances très courtes », se souvient Jean-Michel Godet, le directeur général de l’Institut régional du travail social (IRTS) Normandie-Caen. Certes, en définitive, « la plateforme a été fiable, et a rendu le service que l’on pouvait en attendre », apprécie-t-il, après avoir lui-même œuvré à cette extension, en tant que vice–président de l’Union nationale des acteurs de formation et de recherche en intervention sociale (Unaforis). « On a essuyé les plâtres », ajoute tout de même son collègue Manuel Pélissié, directeur général de l’IRTS Paris Ile-de-France, où pas moins de six classes ont dû être ainsi composées.
Une opportunité
Ces préinscriptions désormais bouclées, une question peut donc titiller dans les centres de formation. « Parcoursup peut-il être une opportunité, face la perte d’attractivité de nos métiers ? », comme le formule Agnès Vinchon, directrice de l’Institut social de Lille. De fait, pour les bacheliers recherchant, sur cette plateforme, leur formation de premier cycle, apparaissait, cette année, cette ligne intrigante : « Formations diplômantes du secteur sanitaire et social. » De quoi se découvrir un intérêt, peut-être insoupçonné, pour le métier d’éducateur de jeunes enfants ou encore celui d’éducateur technique spécialisé.
Jusqu'à un tiers en plus
A vrai dire, pour le diplôme d’Etat « assistant de service social » proposé à Lille, début septembre, l’effet n’était « pas encore flagrant », aux dires d’Agnès Vinchon – qui attendait cependant d’avoir plus de recul pour en tirer le bilan. Mais à l’échelle nationale, Jean-Michel Godet confirme déjà que « Parcoursup a rendu beaucoup plus visible l’offre de formations en travail social ». Et selon lui, le nombre des candidats pourrait avoir « augmenté de un quart à un tiers » par rapport à 2018. Son propre établissement normand, par exemple, a reçu plus de 300 candidatures, pour les 38 places de sa formation des assistants sociaux. Elles n’étaient que 170 l’année précédente. « Cela permet donc d’élargir le choix. » De même à l’IRTS de Franche-Comté, la directrice générale Virginie Gresser a enregistré « de 30 à 40 % de candidats en plus » pour ses quatre filières post-bac.
Plus jeunes
Avec une telle vague de préinscriptions issue de Parcoursup, dès lors, « les profils de nos candidats étaient plus jeunes cette année », observe la responsable de Besançon. Bien sûr, les chômeurs en reconversion restent éligibles à ses formations, mais ils sont devenus, cette année, plus minoritaires encore, parmi ses candidats. « Peut-être les demandeurs d’emploi seront-ils donc moins nombreux à être intégrés finalement », s’interroge Virginie Gresser.
Des listes instables
En revanche « la stabilisation des listes des admis prend plus de temps », ajoute la directrice générale. Chaque bachelier est en effet invité à faire trois vœux sur Parcoursup. Or seule une partie de ces préinscrits en travail social se résoudra, finalement, à payer les frais demandés, puis à tenter l’entretien d’admission. Et les candidats appréciés par les écoles pourront encore opter, in extremis, pour d’autres orientations. « Nos listes bougent encore », rapportait ainsi Virginie Gresser à seulement quinze jours de sa rentrée.
« Volatilité »
Avec un recrutement ainsi élargi, à l’IRTS francilien, Manuel Pélissié remarque déjà « des candidats qui semblent plus éloignés de notre secteur ». Et il s’interroge sur leur « volatilité » éventuelle. « Partiront-ils aussi vite qu’ils sont venus ? Et, question corollaire, auront-ils pris la place des élèves habituels, ceux qui connaissent déjà le travail social ? » La réponse ne viendra que dans les prochains mois. « C’est même en deuxième année, avec les stages longs, que l’on se rendra compte si ces professions leur conviennent ou pas », estime Virginie Gresser.
Moins catégoriques
Cependant, les nouvelles générations n’ont pas attendu Parcoursup pour se montrer moins catégoriques dans leurs choix d’orientation. « Nos élèves ne viennent plus forcément pour être éducateur spécialisé ou CESF. Ils viennent plutôt pour des métiers de l’aide », observe à Caen Jean-Michel Godet. « Ils sont aussi plus nombreux à vouloir changer de filière en cours de formation » - en attendant d’opter peut-être, durant leur carrière, « pour deux ou trois autres métiers différents ».
Ecrits
Parcoursup aura enfin levé un obstacle de taille, sur le parcours des aspirants aux écoles de travail social : les épreuves écrites ont été supprimées. Elles pouvaient pourtant sembler cruciales, pour évaluer les futurs auteurs des « écrits professionnels ». Avec les jeunes recrues, « nombre d’établissements feront donc des entretiens de positionnement, dès la rentrée, pour voir ce qui peut être à travailler », sait Jean-Michel Godet, à l’Unaforis. Mais selon lui, « une baisse très nette du niveau écrit » est d'ores et déjà constatée. Et Parcoursup n’en est évidemment pas responsable.