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Portrait29 mai 2020
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Paroles de travailleurs sociaux : « le terrain est la meilleure école »

Les travailleurs sociaux aussi méritent des applaudissements. Avant le confinement, nous sommes partis à la rencontre de professionnels qui se passionnent pour leur métier et qui défendent ses valeurs. Aujourd'hui, Karima Ladjel, monitrice-éducatrice à la résidence sociale "Aux rives de l’Ourcq" à Bobigny, raconte son parcours qui fait la part belle à l'expérience de terrain.

Elle aurait pu faire carrière au sein d’une entreprise d'enseignes lumineuses, son premier job. Mais « au fond de moi, je sentais que j’étais pressentie à autre chose, c’était inné », sourit Karima Ladjel, 38 ans. Aujourd’hui monitrice-éducatrice à la résidence sociale Aux rives de l’Ourcq à Bobigny (93), elle a derrière elle une riche expérience de terrain dans le champ du handicap.

« Travailler avec l'humain » 

Titulaire d’un bac pro dans les métiers du secrétariat, appartenant à une famille sans lien avec le social, rien ne la prédisposait à s’orienter vers ce secteur. Mais c’est porté par son désir d’exercer une profession qui lui permette de « travailler avec l’humain et d’apporter de l’aide » qu’elle rompt en 2004 son contrat d’assistante commerciale, pour devenir auxiliaire d’intégration scolaire (les AESH de l’époque) afin d’accompagner des enfants handicapés dans les écoles. Trois années qui confortent son envie de travailler auprès du public handicapé et lui donnent le temps de se renseigner sur les métiers existants.

Formation en alternance

Son objectif ? Devenir aide-médico-psychologique (AMP). Mais alors qu’elle cherche un employeur pour signer un contrat de professionnalisation, une association des Hauts-de-Seine (92) lui propose d’emblée un remplacement dans un foyer de vie accueillant des adultes handicapés intellectuels. Un an de vacation au cours duquel elle apprend sur le tas : faire des toilettes, gérer les comportements imprévisibles des résidents, qui peuvent « brutalement devenir violents alors qu’ils étaient très calmes », raconte-t-elle. Des situations qui ne l’ont pas freinée mais « donné envie de comprendre et d’apprendre à repérer cette violence et à la contrôler ». Elle obtient enfin une formation en alternance d’AMP, un apport bénéfique : « la théorie prenait sens dans ma pratique ».

Le poids de l'affect

Une fois diplômée, elle restera dans cet établissement jusqu’à ce que la routine commence à peser. Les années, rythmées par les mêmes temps forts (le bilan d’activité, les journées portes ouvertes, l’organisation des séjours…) « commençaient à se ressembler, j’avais l’impression d’avoir fait le tour ». L’affect prend aussi le dessus : « J’avais vécu les joies et les peines avec les résidents. Il avait fallu faire face aux décès, je sentais que je commençais à perdre ma posture professionnelle ». Ses six mois de congé maternité après la naissance de ses jumeaux en 2014 lui donnent le temps de mûrir sa réflexion et achèvent de la convaincre : elle veut évoluer.

La VAE comme tremplin

À son retour, elle engage une démarche de validation des acquis de l’expérience (VAE) pour devenir monitrice-éducatrice et change de structure en intégrant un institut médico-éducatif (IME) accueillant des jeunes autistes. Là, elle est formée à l’autisme et prend conscience du contexte "institutionnel" des prises en charge en établissement, « loin des principes de la loi 2002-2 qui place la personne au centre ».

« Découvrir de nouveaux publics » 

Son nouveau diplôme en poche, elle quitte son poste et cherche des missions de courtes durées « pour découvrir de nouveaux publics ». Mais l’agence d’intérim lui propose un poste dans le cadre de l’ouverture de la résidence sociale Aux rives de l’Ourq, projet porté par l’association Vivre et Devenir. Un dispositif inclusif qui résonne avec ses convictions. Et pour lequel « il y avait tout à construire, en particulier les partenariats », explique-t-elle. Face à ce nouveau public – des personnes ayant des difficultés sociales et financières souffrant souvent de troubles psychiques et avec un passé d’errance – « elle doit adapter » sa posture car « contrairement aux institutions, les résidents sont libres de leurs allées et venues ».

Garder le contact avec le terrain

Elle pense alors à l’étape d’après : devenir éducatrice spécialisée. Une nouvelle fois elle se lance dans une formation en alternance qui lui permet de « ne pas perdre le contact avec le terrain ». Car elle le revendique : « le terrain est la meilleure école, j’ai beaucoup appris au contact des autres professionnels ».

« Un repère pour les personnes » 

Au-delà du travail d’équipe, c’est aussi la rencontre avec les résidents qui la nourrit : « Nous passons une partie de notre vie avec eux, ce n’est pas rien, on partage beaucoup de choses, des confidences, nous sommes un repère, c’est très valorisant ».

Nouvelles responsabilités

Et même quand elle part en voyage, sa fibre altruiste ne la quitte pas : « dès que je suis en vacances à l’étranger, il y a toujours un moment où je rencontre une personne en situation de handicap avec qui j’entre en contact ». Une aptitude « innée » qui promet de la conduire vers de nouvelles responsabilités.

Car la suite est déjà tracée : l’association Vivre et devenir prévoit de lui confier la gestion d’un dispositif d’habitat inclusif destiné à héberger des personnes en appartements dans le diffus. Un nouveau défi pour cette nageuse régulière, qui ne manque pas d’endurance.

NoémieCOLOMB (texte), Benjamin LENEVEUT (vidéo)
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