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Article25 octobre 2019
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Pauvreté : inquiétudes sur le projet de rattachement de l’Onpes au CNLE

Alors que le gouvernement envisage de rattacher l’Observatoire national de la pauvreté (Onpes) au Conseil national des politiques de lutte contre l'exclusion sociale (CNLE), des chercheurs et des représentants associatifs alertent sur les risques de ce projet. Et demandent des garanties en matière d’indépendance et de moyens.

L’Observatoire national de la pauvreté et de l’exclusion sociale (Onpes) serait-il en voie de disparition ? C’est en tout cas la crainte de plusieurs acteurs du monde associatif et de la recherche, qui dans une tribune publiée dans le quotidien Libération du 21 octobre, ont alerté sur le projet du gouvernement de supprimer cette instance.

Missions préservées 

Une critique aussitôt démentie par Édouard Montchamp, chargé de communication de la secrétaire d'État Christelle Dubos : « Il n’est pas question de supprimer l’Onpes mais de l’arrimer au Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale (CNLE) qui est en train de se réformer [1] ». Selon lui, le gouvernement souhaite que le CNLE devienne « une entité capable, par sa capacité de représentation des personnes en situation de précarité mais aussi par sa capacité à produire des études, un vrai soutien de la puissance publique ». Alors que les modalités de ce rapprochement restent encore à définir, pour lui, une chose est certaine : « les missions de l’Observatoire seront préservées ».

Rigueur méthodologique

Pas sûr que cette réponse suffise à rassurer les auteurs de la tribune qui, s’ils ne s’opposent pas au rapprochement de l’Onpes et du CNLE, craignent que cela ne s’accompagne de la disparition des spécificités de l’Onpes. « L’originalité de l’Observatoire est de faire dialoguer deux formes de connaissances de l’exclusion : l’une expérientielle, l’autre scientifique », rappellent-ils.

Cette alliance permet à cette instance de développer « une rigueur méthodologique et de faire consensus entre le monde associatif et les chercheurs », précise Florent Gueguen, directeur général de la Fédération des acteurs de la solidarité et signataire de la tribune. Il rappelle que la force de l'Observatoire est d'avoir pu réaliser des enquêtes qualitatives comme sur la construction des budgets de référence ou l’invisibilité sociale.

Perte d'indépendance

Autre risque pointé par les auteurs de la tribune ? La perte de l’indépendance de l’Observatoire. Les auteurs voient en effet dans ce projet « la volonté de brider une expression indépendante sur des sujets aussi sensibles que celui des inégalités économiques, sociales, territoriales, éducatives, de santé, de logement... ». Florent Gueguen demande donc que « l’autonomie de l’Onpes soit assurée à travers la liberté dans les choix de ses recherches ». 

Quid des moyens ?

Autre point noir : les moyens de l'Onpes seront-ils transférés au CNLE ? « Le gouvernement cherche à réduire le nombre d’instances consultatives rattachées aux différents ministères et cette suppression s’inscrit dans ce cadre-là, explique Florent Gueguen. Or supprimer l’Onpes reviendrait à faire des économies de bouts de chandelles alors que la France manque de chiffres et d’analyses consensuelles sur la pauvreté ». Et le directeur de la fédération de réclamer « des garanties sur la conservation des moyens ».

Hasard du calendrier, ce projet a été annoncé au lendemain de la diffusion par l’Insee d’une étude mettant en avant l’augmentation de la pauvreté en France. Dans ce contexte de hausse de la précarité, les auteurs de la tribune s'interrogent : « l’objectif recherché serait-il de casser le thermomètre pour ne plus voir le malade ? » 

[1] Comme prévu par la stratégie Pauvreté, la composition du CNLE vient d'être modifiée pour accueillir davantage de personnes concernées par la pauvreté. Lire notre article ici.

Le sociologue Nicolas Duvoux exige des garanties avant début décembre

Sur Twitter, le sociologue Nicolas Duvoux rappelle qu’il travaille depuis deux ans, en collaboration avec l’Onpes, à l’élaboration d’un séminaire qui doit être lancé le 3 décembre sur les trajectoires de pauvreté et d’exclusion sociale associant chercheurs, statisticiens, associations et personnes en situation de pauvreté. Il espère que d’ici là « les garanties pour préserver le travail collectif accompli et le valoriser en conservant la rigueur des analyses qui sont la marque de fabrique de l’Onpes auront pu être apportées ».

Et ajoute : « A plus long terme, au-delà des moyens humains et financiers, indispensables, doter l’instance qui succédera à l'Onpes au sein du CNLE d’une capacité d’auto-saisine est la principale garantie de son indépendance, la pierre de touche des intentions du gouvernement ».

NoémieCOLOMB
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